Vie de rang

2015-2016 © Betty Bogaert


Octobre, les feuilles tombent et marquent la fin de l’automne. C’est en suivant les routes de notre région que je découvre les habitants de Saint-Adelme, petite municipalité de la Matanie en Gaspésie. J’ai une certaine fascination pour les lieux reculés. Je m’enfonce sur les rangs numérotés traversant de gauche à droite la route principale. Rang 1, rang 2, rang 3.. ici passent seulement ceux qui y vivent, peut-être aussi quelques chasseurs et forestiers. Marchant le long des routes, je fais le premier pas et m’invite chez eux. Le bois craque lorsque je monte sur le perron de la première maison pour frapper à la porte. Quelqu’un m’ouvre, m’invite à entrer, à m’assoir pour me réchauffer, et me partage un peu de son intimité. On me parle d’histoire de famille, de souvenirs d’enfance, d’isolement, de traditions. Je balaye la pièce du regard et les objets posés sur les meubles s’ajoutent à la conversation. On me joue de l’accordéon, du piano, du violon, on m’offre des œufs frais, on me demande si je vais repasser.

Ce projet dresse en image un portrait de ces habitants des rangs, reposant entre ville et nature. Objets, paysages, intérieures de maison se mélangent et tracent le lien étroit qui les maintient à leur environnement, à leurs récits de vie, à leurs souvenirs. Les histoires endormies dans les mémoires renaissent, et cet inconnu dit « banal » devient peu à peu familier.